Je travaille dans le domaine de la santé, et je bataille pour comprendre comment le concept de flux, que j’arrive à comprendre en production, s’applique dans les services ?
Mettons-nous un instant à la place du patient. La dernière fois que j’ai été opéré – un problème mineur à la main – j’ai dû venir une première fois à la clinique pour prendre les rendez-vous préliminaires, pour (1) faire la partie administrative, (2) remplir un formulaire avec l’anesthésiste, et (3) avoir un entretien avec le chirurgien. Puis on me renvoya à la maison. C’est une bonne clinique, et je n’ai pas eu à attendre beaucoup entre ces rendez-vous, mais cela m’a quand-même pris une demi-journée.
Quand est venu le jour fatidique, on m’a mis dans un box, où j’ai attendu. Une infirmière est venue et m’a donné des comprimés à prendre, et j’ai attendu. Puis une autre infirmière m’a préparé pour l’opération, et j’ai attendu. Puis le lit roulant est venu pour m’emmener au bloc opératoire. J’ai été opéré (tout en priant pour que quoi qu’ils fassent, ils le fassent bien – je ne pouvais pas voir ce qu’ils faisaient sur ma main derrière un champ opératoire), puis renvoyé dans le box. J’ai encore attendu jusqu’à ce que je me sente mieux, et qu’on ait vérifié qu’il n’y avait pas d’effets secondaires. Finalement, on m’a mis dans un taxi vers la maison. Je dois bien admettre que globalement, c’était très efficace, mais ça a quand-même pris une journée entière. Plus tard, j’ai eu un rendez-vous de vérification avec le chirurgien, et un dernier pour retirer les points.
Ce que je veux souligner ici est que tout s’est bien passé, il n’y a pas eu d’effets secondaires, mon problème de main a été soigné, une belle performance médicale en fait. Mais tout de même un processus terrible.
Le flux continu représente un idéal dans lequel tous les actes qui m’ont été prodigués l’auraient été continument, s’enchaînant de manière fluide, de sorte que j’aurais pu être de retour chez moi au bout de deux ou trois heures en tout, au-lieu d’une journée entière plus deux demi-journées à un mois d’intervalle (sans compter le temps en salle d’attente). Le flux continu est difficile à atteindre du fait de contraintes bien réelles :
- Attendre la disponibilité du « monument » central, comme le bloc opératoire. Tous les patients doivent y passer, en séquence. Il y a donc une file d’attente.
- Attendre la disponibilité des différents spécialistes, car ils ne travaillent pas dans un même îlot. Vous vous baladez de l’un à l’autre, et même si le processus est bon, il y aura fatalement des temps d’attente entre chaque
- Temps d’attente pour vérifier qu’il n’y a pas d’effets secondaires immédiats après chaque étape critique – temps de vérification, si vous préférez.
Appel pour le Dr McCoy
Idéalement, le patient pourrait, juste après son admission, être installé dans un endroit où tous les spécialistes s’occuperaient de lui en séquence, le prépareraient pour l’opération, et tout l’équipement nécessaire à l’opération serait amené à son chevet, ce qui est actuellement impossible. Mais quand-même. En tant qu’écrivain, j’ai besoin d’un bon café pour bien écrire, et autrefois, je devais aller au bistro du coin pour avoir mon expresso, alors que maintenant je peux le faire chez moi avec la machine de George Clooney – la technologie nous aide à réduire les monuments en outils plus petits et plus flexibles, que nous pouvons intégrer dans les processus.
Le deuxième aspect d’un flux continu est le flux continu du travail du personnel soignant:
- une séquence de travail fluide et continue pour chaque personne, sans obstacle ou temps d’attente
- un passage de témoin sans heurt d’une personne à l’autre au sein de l’équipe
Bien entendu, il est extrêmement difficile d’organiser un flux qui soit continu à la fois pour le patient et pour le soignant – infirmière, médecin, administratif – et c’est exactement pour cela que le flux continu constitue un idéal: de la science-fiction! Dans Star Trek, le Dr Mc Coy examine et soigne tout le monde sur-le-champ. Un jour, peut-être…
Par conséquent, nous pouvons nous demander comment rendre le flux de soins plus fluide pour tel patient, et comment rendre le flux de travail plus fluide pour le soignant. Nous verrons ensuite les lacunes évidentes et pourrons les corriger. Cela révèlera une première couche de gaspillages dans notre manière d’organiser les soins, puis une seconde au fur et à mesure que nous enlèverons les couches de cet oignon.
Tentez votre chance
Le flux continu s’applique toujours dans la mesure où l’on s’applique à faire progresser sans heurt le flux de travail pour le client, et en douceur pour l’opérateur. C’est une expérience mentale que l’on peut mener dans n’importe quelle situation. De manière évidente, il n’est pas toujours possible de le faire en pratique car certaines analyses nécessitent des équipements lourds, comme par exemple en radiologie, ou bien de coordonner un grand nombre de personnes, comme un bloc opératoire, et il serait particulièrement inefficace de vouloir le faire à tout prix.
Quoi qu’il en soit, en comparant nos pratiques réelles avec le flux continu, nous pouvons toujours trouver de nouvelles opportunités d’améliorer notre flux. Tentez votre chance, et observez ce qui se passe, tirez-en les enseignements et essayez autre-chose.
La quête du flux est la clé de l’amélioration d’un troisième flux, celui des idées, qui est lui la clé d’une meilleure prise en compte des patients et d’une meilleure efficacité du personnel soignant.
Traduit de l’américain par François Lopez
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